Citation de Pablo Neruda

samedi 30 novembre 2013

LE RÊVEUR DE PAM MUÑOZ RYAN: MEILLEUR LIVRE JEUNESSE 2013

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RICARDO ELIECER NEFTALÍ REYES BASOALTO ENFANT 
À partir de quelques épisodes biographiques connus, la romancière s'est approchée de la vie du Prix Nobel. Une santé fragile, une belle-mère protectrice et un père tyrannique font que le jeune Neftali quitte peu la chambre, rêvassant, collectionnant les scarabées et griffonnant dans ses cahiers. Au grand dam du maître de maison! Grâce à son oncle, directeur d'un journal local, il publiera quelques articles faisant naître en lui l'homme de lettres engagé autant qu'il déclenchera les foudres paternelles. Etudiant, il prendra un pseudonyme pour vivre pleinement sa passion. 

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COUVERTURE DE « THE DREAMER » DE
PAM MUÑOZ RYAN, CHEZ  SCHOLASTIC PRESS, NEW YORK
Ponctué de courts textes issus du Livre des questions, ce roman enchante car il prouve que rien n'arrête une vocation. « Je suis la poésie sillonnant le grand bleu [...] je cherche un cœur sans méfiance. Regarde. Regarde-moi ». Plus qu'un fil tissé vers l'univers de Neruda, Le Rêveur constitue une passerelle où poser le pied pour entrer en Poésie. 

Le Rêveur, par Pam Muñoz Ryan. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Pascale Houssin, ill. Peter Sís (Bayard).  

mardi 12 novembre 2013

neruda pez

PAS DE TRACES DE POISONS DANS LES RESTES DE PABLO NERUDA

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LE PHOTOGRAPHE BRÉSILIEN EVANDRO TEIXEIRA A COUVERT SECRÈTEMENT LA MORT DE NERUDA. IL A PU S'INTRODUIRE À LA CLINIQUE « SANTA MARIA », EN CACHANT SON APPAREIL PHOTO « LEICA » SOUS SA CHEMISE.  PHOTO EVANDRO TEIXEIRA
Les analyses des ossements ont été réalisées par un groupe interdisciplinaire de scientifiques, comptant 13 experts et trois observateurs. Ils ont été effectués au Chili, en Espagne et aux États-Unis. Les tests ont tenté de déceler des traces de poisons y compris le thallium ou l'arsenic - mais ce sont en tout plus de 2000 agents chimiques qui ont été passés au crible. 

Or, le seul élément détecté est un dérivé du dipyrone, médicament utilisé dans les années 70 pour lutter contre... le cancer de la prostate. « Nos résultats signifient qu'il n'existe aucune preuve médico-légale impliquant une mort non naturelle », a expliqué Francisco Etxeberria, anthropologue de l'université du Pays Baque en Espagne, et membre de la commission scientifique d'analyse. 

Ce qui est en revanche flagrant, c'est que les rayons X attestent d'une multitude de métastases, issues du cancer à la prostate dont été victime le poète. « Diverses techniques complémentaires ont confirmé la présence de métastases dans divers segments du squelette en correspondance avec la maladie pour laquelle était traité M. Pablo Neruda », indique pour sa part Patricio Bustos, directeur du Service Médico-légal (SML) du Chili, cité par l'AFP.

De nouveaux examens en perspective

La thèse de l'assassinat n'est pour autant pas écartée: en effet, l'équipe de Etxebarria explique que l'absence de preuve scientifique tient plutôt à ce que les traces résiduelles de poisons dans l'organisme se sont estompées depuis le temps. Un agent comme le gaz sarin ne serait présent qu'à des niveaux absolument indétectables.

Le juge Mario Carroza, a ajouté que de nouveaux tests pourraient être nécessaires et demandés, notamment pour s'assurer que les restes exhumés de la tombe, dans la maison de campagne de Isla Negra, au Chili... sont bien ceux du poète. 

À l'origine de cette demande de tests, l'ancien chauffeur de Neruda, Manuel Araya. Ce dernier avait affirmé que le Nobel de littérature avait reçu une injection suspecte, lors de son arrivée à la clinique de Santiago. En regard des accointances avec le parti communiste, dont il était un membre éminent, mais également ses amitiés avec le leader socialiste, Salvador Allende, la mort de Neruda pouvait avoir du sens, pour le futur dictateur de de droite, Pinochet. 

Pour Rodolfo Reyes, neveu de Neruda, cette nouvelle n'apporte rien de plus qu'un besoin d'approfondir l'enquête. « Nous devons continuer à enquêter. Cela ne fait que commencer », assure-t-il. Surtout que les tribunaux chiliens sont actuellement en train d'étudier la mort de l'ancien président Eduardo Frei, décédé dans la même clinique que Neruda. Un autre politicien, arrivé pour un problème de hernie, serait décédé dans d'étranges conditions, en 1982, après qu'une infection lui a été détectée...

vendredi 8 novembre 2013

MORT DE PABLO NERUDA «AUCUN AGENT CHIMIQUE N’A ÉTÉ DÉTECTÉ», POUR LA JUSTICE CHILIENNE

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PABLO NERUDA. AGENCE DE PRESSE XINHUA, CHINE

Le juge Mario Carroza ne boucle cependant pas
LE MÉDECIN GUILLERMO REPETTO  
l’affaire. L’avocat de la famille demandera d’autres analyses de substances cette fois biologiques pouvant conclure à un assassinat. Une cause de décès que les experts internationaux n’écartent pas non plus, comme l'explique le toxicologue espagnol Guillermo Repetto.

« Il existe des substances qui disparaissent très rapidement des restes osseux, nous n’écartons pas la possibilité qu’elles aient pu exister. Ce que nous disons, c’est que nous n’avons pas détecté de substance qui indique qu’il faille écarter la mort naturelle. »

Parmi ces substances volatiles, il y a le gaz sarin, un gaz utilisé par la dictature. Si le doute persiste, l’hypothèse de la mort naturelle tout de même s’impose chaque fois plus.

CHILI : LE PRIX NOBEL PABLO NERUDA NE SERAIT PAS MORT D'EMPOISONNEMENT

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« PABLO A VOULU ÊTRE TRANSPORTÉ CHEZ LUI. NOUS NE L’EMMÈNERONT NULLE PART AILLEURS», A PRÉVENU MATILDE. CERCUEIL DE PABLO NERUDA. PHOTOGRAPHIE D'EVANDRO TEIXEIRA
PABLO NERUDA
« Diverses techniques complémentaires ont confirmé la présence de métastases dans divers segments du squelette en correspondance avec la maladie pour laquelle était traité M. Pablo Neruda », a-t-il précisé lors d'une conférence de presse.

Les examens réalisés par des universités espagnoles et américaines n'ont « pas permis de trouver l'étiologie de causes non naturelles dans la mort de Pablo Neruda » , a ajouté l'expert.

Cette enquête visait à déterminer si Pablo Neruda était bien mort d'un cancer de la prostate le 23 septembre 1973, comme l'affirme son certificat de décès, ou s'il a succombé à une mystérieuse injection faite la veille de son départ pour le Mexique où il envisageait de s'exiler pour y diriger l'opposition au général Pinochet, comme l'affirme celui qui était à l'époque son chauffeur, Manuel Araya.


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UNE DE L'HUMANITÉ DU 27 SEPTEMBRE 1973  CONSACRÉ AUX LES OBSÈQUES DU POÈTE PABLO NERUDA 

Après une longue bataille judiciaire, l'exhumation des restes de Pablo Neruda a été réalisée en avril dernier à Isla Negra, sur la côte centrale du Chili, lieu de résidence du poète où il était enterré.

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LE CERCUEIL AVEC LA CADAVRE DE PABLO NERUDA
EST POSÉ À MÊME LE SOL. PHOTO EVANDRO TEIXEIRA

Selon la version officielle du régime militaire, Pablo Neruda est mort d'un cancer de la prostate le 23 septembre 1973, 12 jours après le putsch du général Pinochet contre le président socialiste Salvador Allende, grand ami du poète.

lundi 21 octobre 2013

LE PRIX NOBEL EN 1971

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PABLO NERUDA REÇOIT LE PRIX NOBEL DE LITTERATURE 1971 DES MAINS DU ROI DE SUEDE  

Finalement, comme on le sait, on m'attribua le Prix Nobel. En 1971, je venais d'arriver à Paris comme ambassadeur du Chili, quand on vit mon nom à nouveau cité dans les journaux. Mathilde et moi fronçâmes les sourcils. Habitués à la déception annuelle, nos peaux s'étaient durcies à la nouvelle. Un soir d'octobre, Jorge Edwards, écrivain et conseiller de notre ambassade, entra dans la salle à manger. Avec la parcimonie qui le caractérise, il me proposa un pari très simple. Si on me décernait cette année le Prix, je l'inviterais lui et sa femme dans le meilleur restaurant de Paris. Dans le cas contraire, il paierait mon repas et celui de Mathilde. 

- D'accord! lui dis-je. Nous allons manger merveilleusement et à tes frais! 

Une partie du secret de Jorge Edwards et de son hasardeux pari s'éclaircit le lendemain. J'appris qu'une de ses amies, journaliste et écrivain, lui avait téléphoné de Stockholm pour lui dire que Pablo Neruda avait cette fois toutes les chances d'obtenir le Prix Nobel. 

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PABLO NERUDA AVEC LES LAUREATS DU PRIX NOBEL 12 DECEMBRE 1971 A STOCKHOLM PHOTO BETTMANN-CORBIS

Les journalistes commencèrent à m'appeler de très loin, de Buenos Aires, de Mexico, et surtout d'Espagne. 

En Espagne, c'était un fait acquis. Naturellement, je me refusai à toute déclaration, mais mes doutes réapparurent. 

Ce soir-là, Arthur Lundkvist, le seul ami écrivain que j'eusse en Suède, vint me rendre visite. Lundkvist était académicien depuis trois ou quatre ans. Il arrivait de Son pays et se rendait dans le midi de la France. Au café, je lui fis part de mes difficultés pour répondre aux journalistes qui, sur des téléphones internationaux, m'interrogeaient à propos du prix qu'ils m'attribuaient sans plus attendre.

 - Je voudrais te demander une chose, Arthur, lui dis-je. Si c'est la vérité, j'aimerais beaucoup le savoir avant la presse. Je voudrais l'annoncer en priorité à Salvador Allende, avec qui j'ai tant lutté. Il sera très heureux d'être le premier à recevoir la nouvelle. 


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PABLO NERUDA ET SON PRIX NOBEL DE LITTERATURE 1971

Les yeux suédois du poète académicien Lundkvist me regardèrent gravement, très gravement: 

- Je ne peux rien te dire. S'il y a du nouveau, le roi de Suède ou notre ambassadeur à Paris te le communiqueront par un télégramme. 

Ceci se passait le 19 ou le 20 octobre. Le 21, au matin, les salons de l'ambassade commencèrent à se remplir de journalistes. Les opérateurs des télévisions suédoises, allemandes, françaises et latino-américaines montraient une impatience qui menaçait de se transformer en émeute devant mon mutisme, dû simplement au manque d'information. À onze heures et demie, l'ambassadeur de Suède m'appela pour me demander de le recevoir, sans autres précisions, ce qui ne contribua pas à calmer les esprits, puisque notre entrevue devait avoir lieu deux heures plus tard. Les téléphones, eux, continuaient de sonner hystériquement. 

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PABLO NERUDA REÇOIT LE PRIX NOBEL DE LITTERATURE 1971 DES MAINS DU ROI DE SUEDE  

Au même instant, une radio de Paris lança un flash, une nouvelle de dernière minute annonçant que le Prix Nobel 1971 venait d'être décerné « au poète chilien Pablo Neruda ». Je descendis aussitôt affronter la tumultueuse assemblée des organismes d'information. 

Heureusement, je vis apparaître alors mes vieux amis Jean Marcenac et Aragon. Marcenac, grand poète et qui est comme mon frère en France, poussait des cris de joie. Aragon, de son côté, paraissait plus heureux que moi de la nouvelle. Tous deux m'aidèrent dans cette difficile corrida avec les journalistes. 

Je venais d'être opéré, j'étais encore très faible et marchais avec peine, j'avais assez peu envie de me mouvoir.

Extrait de J'avoue que j'ai vécu de Pablo Neruda. Traduit par Claude Couffon. Éditions Gallimard, collection "Folio" pages 451 et 452

mardi 24 septembre 2013

CHILI : 40 ANS APRÈS LA MORT DE PABLO NERUDA

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LE PHOTOGRAPHE BRÉSILIEN EVANDRO TEIXEIRA A COUVERT SECRÈTEMENT LA MORT DE NERUDA. IL A PU S'INTRODUIRE À LA CLINIQUE « SANTA MARIA », EN CACHANT SON APPAREIL PHOTO « LEICA » SOUS SA CHEMISE.  PHOTO EVANDRO TEIXEIRA

À l’époque, une version officielle fut fournie très vite aux medias : le poète est décédé de mort naturelle, emporté par le cancer. Mais tout aussi vite, certains amis de l'artiste ont démenti cette version.
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LA MISE EN BIÈRE DE PABLO NERUDA EN
SEPTEMBRE 1973, DANS UN COULOIR DE LA
MORGUE À LA CLINIQUE « 
SANTA MARIA »
À SANTIAGO. PHOTO EVANDRO TEXEIRA
Deux témoignages sortent du lot. D'abord celui de Manuel Araya, ancien chauffeur et assistant du Nobel chilien qui conteste la version officielle et dénonce une « mort induite ».  Selon lui, le poète a été hospitalisé quelques heures avant sa mort et a reçu une injection dissimulée, autrement dit, il a été  empoisonné. Un deuxième témoignage, celui de l'ambassadeur du Mexique au Chili, Gonzalo Martinez, qui a vu Neruda juste avant sa mort, va dans le même sens. Il confirme que le poète était malade, mais sûrement pas à l'agonie. L'ambassadeur Martinez avait préparé la sortie du Chili de Neruda. Le président mexicain de l'époque, Luis Echeverria, avait mis à sa disposition un avion, pour permettre au poète de quitter plus aisément le pays pour Mexico, le 24 septembre 1973. Neruda est mort quelques heures avant ce voyage. 


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L’EXHUMATION DES RESTES DU POÈTE PABLO NERUDA A COMMENCÉ LUNDI 8 AVRIL 2013 À ISLA NEGRA, SUR LA CÔTE CENTRALE DU CHILI. LA JUSTICE VEUT DÉTERMINER SI LE POÈTE, DÉCÉDÉ EN 1973 PEU APRÈS LE COUP D'ETAT DE PINOCHET, EST BIEN MORT D'UN CANCER COMME LE VEUT LA VERSION OFFICIELLE, OU S'IL A ÉTÉ ASSASSINÉ.

L’hypothèse de l’assassinat fut démentie par la Fondation Neruda, et par certains de ses anciens amis, « On peut tuer un moribond, mais politiquement ce n'est pas intéressant » soutenait Jorge Edwards, il y a quelques jours à la radio. La version a néanmoins incité le Parti communiste chilien, dont le poète fut membre, à porter plainte en 2011.

La dépouille de l'écrivain, enterrée à Isla Negra, a été exhumée en présence d'une équipe de médecins légistes et d'experts internationaux. Les prélèvements seront ensuite analysés dans des laboratoires de trois pays et les résultats devraient être connus dans plusieurs mois.

lundi 23 septembre 2013

« PABLO NERUDA ÉTAIT UN SYMBOLE À ABATTRE »

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LE PHOTOGRAPHE BRÉSILIEN EVANDRO TEIXEIRA A COUVERT SECRÈTEMENT LA MORT DE NERUDA. IL A PU S'INTRODUIRE À LA CLINIQUE « SANTA MARIA », EN CACHANT SON APPAREIL PHOTO « LEICA » SOUS SA CHEMISE.  PHOTO EVANDRO TEIXEIRA
Nous, nous craignions pour sa vie car on le savait en danger. L’ambassadeur du Mexique voulait le faire sortir du pays. Il devait d’ailleurs s’y rendre le 24 septembre 1973. Le 22, Neruda me dit d’aller à Isla Negra pour faire ses valises et lui ramener douze livres. Lorsque nous partons avec Matilde, il va bien. Puis, dans l’après-midi, nous recevons un appel pour nous informer qu’on lui a fait une piqûre. Lorsque nous revenons à la clinique, Neruda est rouge, il me dit que tout son corps le brûle. C’est très étrange, mais on m’envoie acheter un médicament. Pourquoi, alors que nous sommes 
dans un hôpital? En sortant, deux voitures m’arrêtent et m’emmènent au commissariat. Neruda meurt le 23 septembre.

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UNE DE L'HUMANITÉ DU 12 SEPTEMBRE 1973 CONSACRÉ À LA MORT DU PRÉSIDENT SALVADOR ALLENDE   

Aujourd’hui, où en est-on désormais de l’enquête ?



Manuel Araya. Officiellement, il serait mort en état de grande faiblesse. Mais cette version est différente de celle la presse de l’époque qui parle de mort liée à une infection urinaire. Dans les années 1970, le médecin Sergio Draper a dit qu’il avait injecté la fameuse piqûre et que Neruda était mort dans ses bras. Mais, lorsqu’il a dû témoigner, il a dit qu’il n’était pas à l’hôpital. Et puis on a découvert que des médecins exerçaient également à Colonia Dignidad (une secte nazie – NDLR) et que d’autres n’existaient même pas!

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UNE DE L'HUMANITÉ DU 27 SEPTEMBRE 1973  CONSACRÉ AUX LES OBSÈQUES DU POÈTE PABLO NERUDA 


Vous dites que Pablo Neruda était en danger. Pourquoi ?



Manuel Araya. Il était surveillé en permanence. Dès le 12 septembre, un bateau militaire s’est posté au large d’Isla Negra. Des militaires sont venus une première fois dans sa maison pour savoir combien de personnes y travaillaient. Le 14 septembre d’autres militaires sont revenus, puis des marins. Notre objectif était alors d’évacuer Neruda. Il était un symbole à abattre. Il fut sénateur, candidat à la présidence, prix Nobel, communiste. Il était connu, reconnu et apprécié du peuple.


Dans le cadre de l’enquête, les restes de Neruda ont été exhumés en avril dernier pour pratiquer des examens ADN afin d’en savoir plus sur les conditions de sa mort…

Manuel Araya. Je m’en réjouis. Quarante ans après sa mort, c’est une façon de faire justice. C’est une première dans l’histoire du Chili. Mais je me méfie aussi. J’ai des doutes sur les compétences du système médico-légal chilien. Il y a eu d’autres affaires de cas de morts et de disparus qui ont montré son incompétence. Les médecins se sont trompés tant de fois, et de nombreux cas n’ont jamais été résolus.

Qu’est-ce que cela a signifié d’être un des hommes de confiance de Pablo Neruda ?

Manuel Araya. Cela a été un orgueil pour moi que de travailler pour lui à partir de 1972. Militant communiste, je l’avais connu dans les années 1950, lorsqu’il nous donnait des conférences. Puis mon Parti m’a confié la grande responsabilité de me mettre à son service. C’était un homme très agréable, fidèle en amitié. Il venait pourtant de la souffrance : il a perdu sa mère quand il était bébé, et son père a toujours été très dur avec lui. Mais il n’a jamais cessé d’aider les gens, de les écouter. Lorsqu’il se promenait dans Isla Negra, il n’hésitait pas à s’arrêter pour parler avec eux. Je regrette que mon Parti ne m’ait pas prêté attention avant. Matilde non plus ne m’a pas écouté. J’ai pourtant frappé à toutes les portes. La Fondation Pablo-Neruda m’a demandé de renoncer à dénoncer la mort de Neruda. Jamais. C’est usurper son héritage.

PABLO NERUDA, AVEC SALVADOR ALLENDE ET VICTOR JARA, LES TROIS MORTS DE SEPTEMBRE AU CHILI

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L’IMAGE DU PRÉSIDENT MARTYR SALVADOR ALLENDE ET SON LÉGAT POLITIQUE SONT RESTÉES DANS LES LUTTES DU PEUPLE. 

Morts tous les trois dans le court intervalle d’une douzaine de jours en Septembre, en plein déferlement des troupes qui en 1973 prenaient d’assaut la démocratie chilienne, ils signalent la fin d’une époque et la tragédie d’un pays, mais portent aussi les prémices d’une fervente volonté de résistance, les signaux d’un long combat quotidien pour la dignité. 

En effet, pendant la longue nuit du Chili, leurs noms ont secrètement circulé entre les barbelés, et ont été audacieusement tracés sur les murs du pays en signe de ralliement et de contestation. L’exemple héroïque de Salvador Allende, les chansons de Víctor Jara et le chant tellurique de Neruda ont accompagné chaque combat de cette longue lutte.   

Septembre d’il y a 40 ans laisse un projet collectif terrassé par les bombes et une vaste armée désarmée, vaincue par la félonie, puis martyrisée par la barbarie. Parmi des milliers d’autres victimes, nos trois morts de Septembre ont atteint le rang de symboles et jouissent d’une stature morale qui reste toujours intacte, qui va même en grandissant. Ils sont vivants et bien portants, leur prestige éclaire toujours les rangs des multitudes et les revendications des peuples.

Leur mémoire, la simple évocation de ces noms que l’on a voulu pourtant éradiquer, signifient aujourd’hui des valeurs universelles. Et une victoire permanente, écrasante et sans fin, sur les putschistes et leurs souteneurs.

vendredi 20 septembre 2013

LA LIRA POPULAR.


À partir de la décennie 1870, on voit circuler au Chili de grands feuillets de mauvais papier qui diffusent les textes des poetas populares, poètes improvisateurs, souvent illettrés, issus des couches défavorisées de la société santiaguina. Vendues cinq centavos dans les rues, les gares, les marchés, ces feuilles constituent un témoignage rare de la culture populaire de la fin du XIXe siècle. 

Les verseros qui vendaient ces feuilles installaient généralement une corde entre poteaux ou arbres et y pendaient leurs feuilles et libelles. La pratique est ancienne et attestée à l’époque moderne en Europe, et donne son nom au genre, la « littérature de cordel». Moins étudiée que son équivalent brésilien, moins connue que l’œuvre de José Guadalupe Posada, graveur mexicain dont les calaveras (« crânes ») ornent jusqu’à nos t-shirts, la littérature de cordel chilienne bénéficie ces dernières années d’un regain d’intérêt qui devrait à terme lui assurer un statut de patrimoine iconographique national.


samedi 13 juillet 2013

PUBLICATION PROCHAINE DES RÉSULTATS DES ANALYSES TOXICOLOGIQUES DES RESTES DE PABLO NERUDA

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LE RAPPORT DE L'UNIVERSITÉ DE FACULTÉ DE MÉDECINE DE LA CAROLINE DU NORD A CONFIRMÉ QUE LE POÈTE SOUFFRAIT DU CANCER DE LA PROSTATE AVANCÉ.
Parallèlement à ces analyses, d'autres échantillons osseux de Neruda ont été envoyés pour analyses à l’Université de Murcia, en Espagne, suite à la décision du juge chilien Mario Carroza, chargé du dossier, rappelle El Mercurio dans son édition électronique. 

L’exhumation des restes de Pablo Neruda a eu lieu en avril dernier dans sa maison à Isla Negra, sous la supervision du juge Carroza, en présence d'une équipe de légistes chiliens et étrangers. La décision de son exhumation a été prise par le juge Carroza, après que le Parti communiste du Chili eut saisi la justice pour éclaircir les circonstances de sa mort, le 23 septembre 1973. 

Aucun effort n’allait être ménagé, pour mobiliser les moyens technologiques nécessaires en vue d'élucider les circonstances de la disparition du poète, a affirmé le juge Mario Carroza à la suite de l’opération d’exhumation. 

Pablo Neruda est mort d'un cancer de la prostate en 1973, quelques jours après le coup d'Etat militaire, selon la version officielle. Mais les proches de Neruda n'y croient pas, évoquant un assassinat.(MAP).

jeudi 11 juillet 2013

DES OS DE PABLO NERUDA PARTENT EN ESPAGNE POUR DES ANALYSES

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PABLO NERUDA CHEZ LUI À ISLA NEGRA EN 1957. PHOTO SERGIO LARRAIN 


Or, selon les scientifiques américains, les premiers résultats semblent plutôt favorables à la thèse du cancer, mais il faudra des examens complémentaires plus poussés pour écarter définitivement l'idée d'un empoisonnement. 

Rodolfo Reyes, neveu du poète, estime que toutes les conclusions seront bonnes à prendre pour parvenir à la vérité sur la mort de Neruda. La présence de métastases, alors que Neruda souffrait officiellement d'un cancer de la prostate, découverte dans les os, ne fait toutefois que valider... le cancer du poète. Et ne permet pas d'en conclure que c'est ce cancer qui l'a tué. 

Début juin, deux mois après que le corps a été exhumé, le juge avait ordonné l'établissement d'un portrait et la recherche d'un probable suspect. Selon la police, l'homme visé par la procédure est soupçonné d'avoir empoisonné Neruda, et par là, causé sa mort à retardement. 

En effet, le docteur Sergio Draper, qui avait vigoureusement défendu la thèse de la mort par cancer était revenu sur ses déclarations. D'autant qu'à ses côtés, un certain docteur Price était présent. Problème, les archives de l'établissement hospitalier ne mentionnent nulle part ce nom et Draper n'a jamais revu l'homme exercer sur les lieux. Relais de ces aveux, l'avocat de la défense Eduardo Contreras a estimé que de nouvelles évidences prouvaient que le poète avait été probablement assassiné par des agents de l'homme fort du tout jeune régime militaire.

Plus troublant encore, la description physique du docteur Price rappelle Michael Townley, reconnu agent-double de la CIA et officiant pour la junte militaire. L'homme avait bénéficié d'un programme de protection rapprochée après avoir avoué le meurtre d'opposants à Pinochet à Washington et Buenos Aires. Mais pour Contreras il ne faut pas perdre de vue que derrière l'exécution, il s'agit de trouver l'homme qui a ordonné la mise à mort.

Patricio Bustos Streeter, directeur du service médico-légal du Chili qui dirige les opérations expliquait, début juin : « La présence de métastases osseuses du cancer de la prostate confirmerait un état avancé de la maladie. De l'autre côté, des traces de toxines peuvent être trouvées dans la partie spongieuse de l'os qui contient la moelle osseuse », a-t-il indiqué. 

Une difficulté que le médecin tempèrait. L'absence de documentation sur les traitements pris par Neruda complique la distinction entre poison et protocole médicamenteux. Mais le médecin rassure en rappelant que « plusieurs techniques de camouflage d'empoisonnement dans le corps n'existaient pas il y a quarante ans ».

Bien évidemment, l'idée que Pinochet ait orchestré cet assassinat est sur toutes les bouches. « Neruda a reçu une injection le 23 septembre. S'ils ne lui avaient pas administré, Neruda ne serait pas mort », a toujours assuré Manuel Araya, chauffeur de Neruda.

Et de poursuivre : « Il devait se rendre le 24 à Mexico, et le 23, il a reçu cette injection, dont il est mot six heures plus tard. Par ailleurs, il y a cette troublante coïncidence qu'ils m'aient envoyé à la recherche d'un médicament, une course qui m'a tenu éloigné de Neruda, laissé seul. C'est une preuve suffisante démontrant que Neruda a été assassiné.  »

lundi 17 juin 2013

JE DEMANDE LE SILENCE

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PABLO NERUDA  PENSIF À ISLA NEGRA AU CHILI 1969.
PHOTO  SARA FACIO IMAGE RECADRÉE PAR ÉRIC ATLAN, 
POUR LE FILM « PABLO NERUDA »  D’AMALIA ESCRIVA 
POUR UN SIÈCLE D'ÉCRIVAINS






         
« PIDO SILENCIO » -Ñ- DE PABLO NERUDA LU PAR LE POÈTE LUI-MÊME, 
CE TITRE EST EXTRAIT DE L' ALBUM « ESTRAVAGARIO » (VAGUEDIVAGUE), 
PROJET DISCOGRAPHIQUE PRODUIT EN 1966, AVEC UNE SÉLECTION 
DE POÈMES DU LIVRE DE NERUDA DU MÊME NOM, ÉDITÉ PAR EMI ODEON 



Qu’on me laisse tranquille à présent
Qu'on s'habitue sans moi à présent

Je vais fermer les yeux. 

Et je ne veux que cinq choses, 
cinq racines préférées 

L'une est l'amour sans fin. 

La seconde est de voir l'automne 
Je ne peux être sans que les feuilles 
volent et reviennent à la terre. 

La troisième est le grave hiver, 
La pluie que j'ai aimée, la caresse 
Du feu dans le froid sylvestre. 

Quatrièmement l’été 
rond comme une pastèque. 

La cinquième chose ce sont tes yeux,
ma Mathilde, bien aimée, 
je ne veux pas dormir sans tes yeux, 
je ne veux pas être sans que tu me regardes : 
je change le printemps 
afin que tu continues à me regarder.

Amis, voilà ce que je veux.
C'est presque rien et presque tout.

A présent si vous le désirez partez.
J'ai tant vécu qu'un jour
vous devrez m'oublier inéluctablement,
vous m'effacerez du tableau :
mon cœur n'a pas de fin.

Mais parce que je demande le silence
ne croyez pas que je vais mourir :
c’est tout le contraire qui m’arrive
il advient que je vais me vivre.

Il advient que je suis et poursuis.

Ne serait-ce donc pas qu'en moi
poussent des céréales,
d'abord les grains qui déchirent
la terre pour voir la lumière,
mais la terre mère est obscure,
et en moi je suis obscur :

je suis comme un puits dans les eaux duquel
la nuit dépose ses étoiles
et poursuit seule à travers la campagne.

Le fait est que j'ai tant vécu
que je veux vivre encore autant.

Je ne me suis jamais senti si vibrant,
je n'ai jamais eu tant de baisers.

A présent, comme toujours, il est tôt.
La lumière vole avec ses abeilles.

Laissez-moi seul avec le jour.
Je demande la permission de naître.




« Je demande le silence »  de Pablo Neruda, dans « Vaguedivague  », page 9,  traduction de Guy Suarès, Poésie/ Gallimard, mai 2013

PABLO NERUDA « VAGUEDIVAGUE »

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COUVERTURE DU LIVRE « VAGUEDIVAGUE » DE  PABLO NERUDA



Vient de paraitre dans la collection poésie/Gallimard Vaguedivague. Il s'agit en effet d'une réédition de Vaguedivague, Gallimard, 1971]. Pablo Neruda publie « Estravagario », présenté en français sous le titre Vaguedivague, en 1958. C’est pour lui une œuvre essentielle. 

Un témoignage. Il y rassemble des souvenirs, réels ou imaginaires, qu’il explore, questionnant inlassablement la vie pour qu’elle se révèle à elle-même. Il suit les transformations qu’elle impose et confirme sa foi dans la poésie, comme une réponse à la quête solitaire qui revient toujours à la matière, à l’union des éléments, au mouvement et espère le chant du silence.

Pablo Neruda, Vaguedivague, traduction de Guy Suarès, Poésie/ Gallimard, mai 2013

jeudi 13 juin 2013

« HACIA LA CIUDAD ESPLÉNDIDA »



[ Pour écouter, cliquer sur la flèche ] 

« HACIA LA CIUDAD ESPLÉNDIDA. », DISCOURS  DE PABLO NERUDA 
LU À STOCKHOLM LE 12 DÉCEMBRE 1971. 
 DURÉE : 00:28:36 



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PORTRAIT DE PABLO NERUDA.  
COPYRIGHT ©  THE NOBEL FOUNDATION 1971



Señoras, Señores, Señores académicos, Señores embajadores, amigos :
Mi discurso será una larga travesía, un viaje mío por regiones lejanas y antípodas, no por eso menos semejantes al paisaje y a las soledades del norte. Hablo del extremo sur de mi país. Tanto y tanto nos alejamos los chilenos hasta tocar con nuestros límites el Polo Sur, que nos parecemos a la geografía de Suecia, que roza con su cabeza el norte nevado del planeta.

Por allí, por aquellas extensiones de mi patria adonde me condujeron acontecimientos ya olvidados en sí mismos, hay que atravesar, tuve que atravesar los Andes buscando la frontera de mi país con Argentina. Grandes bosques cubren como un túnel las regiones inaccesibles y como nuestro camino era oculto y vedado, aceptábamos tan sólo los signos más débiles de la orientación. No había huellas, no existían senderos y con mis cuatro compañeros a caballo buscábamos en ondulante cabalgata - eliminando los obstáculos de poderosos árboles, imposibles ríos, roqueríos inmensos,  desoladas nieves, adivinando más bien - el derrotero de mi propia libertad. Los que me acompañaban conocían la orientación, la posibilidad entre los grandes follajes, pero para saberse más seguros, montados en sus caballos, marcaban de un machetazo aquí y allá, las cortezas de los grandes árboles, dejando huellas que los guiarían en el regreso, cuando me dejaran solo con mi destino.

Cada uno avanzaba embargado en aquella soledad sin márgenes, en aquel silencio verde y blanco, los árboles, las grandes enredaderas, el humus depositado por centenares de años, los troncos semi-derribados que de pronto eran una barrera más en nuestra marcha. Todo era a la vez una naturaleza deslumbradora y secreta y a la vez una creciente amenaza de frío, nieve, persecución. Todo se mezclaba: la soledad, el peligro, el silencio y la urgencia de mi misión.

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JOURNAL LA VANGUARDIA D'ESPAGNE SUR LE PRIX NOBEL NERUDA -  OCT 22 - 1971 -- PP 18

A veces seguíamos una huella delgadísima, dejada quizás por contrabandistas o delincuentes comunes fugitivos, e ignorábamos si muchos de ellos habían perecido, sorprendidos de repente por las glaciales manos del invierno, por las tremendas tormentas de nieve que, cuando en los Andes se descargan, envuelven al viajero, lo hunden bajo siete pisos de blancura.

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PABLO NERUDA ET SON PRIX NOBEL DE LITTERATURE 1971 

A cada lado de la huella contemplé, en aquella salvaje desolación, algo como una construcción humana. Eran trozos de ramas acumulados que habían soportado muchos inviernos, vegetal ofrenda de centenares de viajeros, altos túmulos de madera para recordar a los caídos, para hacer pensar en los que no pudieron seguir y quedaron allí para siempre debajo de las nieves. También mis compañeros cortaron con sus machetes las ramas que nos tocaban las cabezas y que descendían sobre nosotros desde la altura de las  coníferas inmensas, desde los robles cuyo último follaje palpitaba antes de las tempestades del invierno. Y también yo fui dejando en cada túmulo un recuerdo, una tarjeta de madera, una rama cortada del bosque para adornar las tumbas de uno y otro de los viajeros desconocidos.

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PABLO NERUDA RECOIT LE PRIX NOBEL DE LITTERATURE 1971 

Teníamos que cruzar un río. Esas pequeñas vertientes nacidas en las cumbres de los Andes se precipitan, descargan su fuerza vertiginosa y atropelladora, se tornan en cascadas, rompen tierras y rocas con la energía y la velocidad que trajeron de las alturas insignes: pero esa vez encontramos un remanso, un gran espejo de agua, un vado. Los caballos entraron, perdieron pie y nadaron hacia la otra ribera. Pronto mi caballo fue sobrepasado casi totalmente por las aguas, yo comencé a mecerme sin sostén, mis pies se afanaban al garete mientras la bestia pugnaba por mantener la cabeza al aire libre. Así cruzamos. Y apenas llegados a la otra orilla, los baqueanos, los campesinos que me acompañaban me preguntaron con cierta sonrisa :

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PABLO NERUDA RECOIT LE PRIX NOBEL DE LITTERATURE 1971 A STOCKHOLM

- Tuvo mucho miedo?

- Mucho. Creí que había llegado mi última hora - dije.

- Ibamos detrás de usted con el lazo en la mano - me respondieron.

- Ahí mismo - agregó uno de ellos - cayó mi padre y lo arrastró la corriente. No iba a pasar lo mismo con usted.

Seguimos hasta entrar en un túnel natural que tal vez abrió en las rocas imponentes un caudaloso río perdido, o un estremecimiento del planeta que dispuso en las alturas aquella obra, aquel canal rupestre de piedra socavada, de granito, en el cual penetramos. A los pocos pasos las cabalgaduras resbalaban, trataban de afincarse en los desniveles de piedra, se doblegaban sus patas, estallaban chispas en las herraduras; más de una vez me vi arrojado del caballo y tendido sobre las rocas. Mi cabalgadura sangraba de narices y patas, pero proseguimos empecinados el vasto, el espléndido, el difícil camino

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PABLO NERUDA RECOIT LE PRIX NOBEL DE LITTERATURE 1971 DES MAINS DU ROI DE SUEDE

Algo nos esperaba en medio de aquella selva salvaje. Súbitamente, como una singular visión, llegamos a una pequeña y esmerada pradera acurrucada en el regazo de las montañas: agua clara, prado verde, flores silvestres, rumor de ríos y el cielo azul arriba, generosa luz ininterrumpida por ningún follaje

Allí nos detuvimos como dentro de un círculo mágico, como huéspedes de un recinto sagrado: y mayor condición de sagrada tuvo aún la ceremonia en la que participé. Los vaqueros bajaron de sus cabalgaduras. En el centro del recinto estaba colocada, como en un rito, una calavera de buey. Mis compañeros se acercaron silenciosamente, uno por uno, para dejar unas monedas y algunos alimentos en los agujeros de hueso. Me uní a ellos en aquella ofrenda destinada a toscos ulises extraviados, a fugitivos de todas las raleas que encontrarían pan y auxilio en las órbitas del toro muerto.
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PABLO NERUDA RECOIT LE PRIX NOBEL
 DE LITTERATURE 1971 EN PRESENCE DE LA
FAMILLE ROYALE SUEDOISE

Pero no se detuvo en este punto la inolvidable ceremonia. Mis rústicos amigos se despojaron de sus sombreros e iniciaron una extraña danza, saltando sobre un solo pie alrededor de la calavera abandonada, repasando la huella circular dejada por tantos bailes de otros que por allí cruzaron antes. Comprendí entonces de una manera imprecisa, al lado de mis impenetrables compañeros, que existía una comunicación de desconocido a desconocido, que había una solicitud, una petición y una respuesta aún en las más lejanas y apartadas soledades de este mundo.

Más lejos, ya a punto de cruzar las fronteras que me alejarían por muchos años de mi patria, llegamos de noche a las últimas gargantas de las montañas. Vimos de pronto una luz encendida que era indicio cierto de habitación humana y, al acercarnos, hallamos unas desvencijadas construcciones, unos destartalados galpones al parecer vacíos. Entramos a uno de ellos y vimos, al claror de la lumbre, grandes troncos encendidos en el centro de la habitación, cuerpos de árboles gigantes que allí ardían de día y de noche y que dejaban escapar por las hendiduras del techo un humo que vagaba en medio de las tinieblas como un profundo velo azul. Vimos montones de quesos acumulados por quienes los cuajaron en aquellas alturas. Cerca del fuego, agrupados como sacos, yacían algunos hombres. Distinguimos en el silencio las cuerdas de una guitarra y las palabras de una canción que, naciendo de las brasas y de la oscuridad, nos traía la primera voz humana que habíamos topado en el camino. Era una canción de amor y de distancia, un lamento de amor y de nostalgia dirigido hacia la primavera lejana, hacia las ciudades de donde veníamos, hacia la infinita extensión de la vida. Ellos ignoraban quienes éramos, ellos nada sabían del fugitivo, ellos no conocían mi poesía ni mi nombre. O lo conocían? El hecho real fue que junto a aquel fuego cantamos y comimos, y luego caminamos dentro de la oscuridad hacia unos cuartos elementales. A través de ellos pasaba una corriente termal, agua volcánica donde nos sumergimos, calor que se desprendía de las cordilleras y nos acogió en su seno.

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PABLO NERUDA AVEC LES LAUREATS DU PRIX NOBEL 12 DECEMBRE 1971 A STOCKHOLM PHOTO BETTMANN-CORBIS

Chapoteamos gozosos, lavándonos, limpiándonos el peso de la inmensa cabalgata. Nos sentimos frescos, renacidos, bautizados, cuando al amanecer emprendimos los últimos kilómetros de jornada que me separarían de aquel eclipse de mi patria. Nos alejamos cantando sobre nuestras cabalgaduras, plenos de un aire nuevo, de un aliento que nos empujaba hacia el gran camino del mundo que me estaba esperando. Cuando quisimos dar (lo recuerdo vivamente) a los montañeses algunas monedas de recompensa por las canciones, por los alimentos, por las aguas termales, por el techo y los lechos, vale decir, por el inesperado amparo que nos salió al encuentro, ellos rechazaron nuestro ofrecimiento sin un ademán. Nos habían servido y nada más. Y en ese « nada más », en ese silencioso nada más había muchas cosas subentendidas, tal vez el reconocimiento, tal vez los mismos sueños.



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DIPLÔME DU PRIX NOBEL DÉCERNÉ À PABLO NERUDA. COPYRIGHT © THE NOBEL FOUNDATION 1971. ARTIST: GUNNAR BRUSEWITZ. CALLIGRAPHER: KERSTIN ANCKERS

Señoras y Señores:

Yo no aprendí en los libros ninguna receta para la composición de un poema: y no dejaré impreso a mi vez ni siquiera un consejo, modo o estilo para que los nuevos poetas reciban de mí alguna gota de supuesta sabiduría. Si he narrado en este discurso ciertos sucesos del pasado, si he revivido un nunca olvidado relato en esta ocasión y en este sitio tan diferentes a lo acontecido, es porque en el curso de mi vida he encontrado siempre en alguna parte la aseveración necesaria, la fórmula que me aguardaba, no para endurecerse en mis palabras sino para explicarme a mí mismo.

En aquella larga jornada encontré las dosis necesarias a la formación del poema. Allí me fueron dadas las aportaciones de la tierra y del alma. Y pienso que la poesía es una acción pasajera o solemne en que entran por parejas medidas la soledad y la solidaridad, el sentimiento y la acción, la intimidad de uno mismo, la intimidad del hombre y la secreta revelación de la naturaleza. Y pienso con no menor fe que todo está sostenido - el hombre y su sombra, el hombre y su actitud, el hombre y su poesía - en una comunidad cada vez más extensa, en un ejercicio que integrará para siempre en nosotros la realidad y los sueños, porque de tal manera la poesía los une y los confunde. Y digo de igual modo que no sé, después de tantos años, si aquellas lecciones que recibí al cruzar un río vertiginoso, al bailar alrededor del cráneo de una vaca, al bañar mi piel en el agua purificadora de las más altas regiones, digo que no sé si aquello salía de mí mismo para comunicarse después con muchos otros seres, o era el mensaje que los demás hombres me enviaban como exigencia o emplazamiento. No sé si aquello lo viví o lo escribí, no sé si fueron verdad o poesía, transición o eternidad, los versos que experimenté en aquel momento, las experiencias que canté más tarde.


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AFFICHE D'HOMMAGE DU PCCH AU NOBEL CHILIEN 1971
De todo ello, amigos, surge una enseñanza que el poeta debe aprender de los demás hombres. No hay soledad inexpugnable. Todos los caminos llevan al mismo punto: a la comunicación de lo que somos. Y es preciso atravesar la soledad y la aspereza, la incomunicación y el silencio para llegar al recinto mágico en que podemos danzar torpemente o cantar con melancolía: mas en esa danza o en esa canción están consumados los más antiguos ritos de la conciencia: de la conciencia de ser hombres y creer en un destino común.

En verdad, si bien alguna o mucha gente me consideró un sectario, sin posible participación en la mesa común de la amistad y de la responsabilidad, no quiero justificarme, no creo que las acusaciones ni las justificaciones tengan cabida entre los deberes del poeta. Después de todo, ningún poeta administró la poesía, y si alguno de ellos se detuvo en acusar a sus semejantes, o si otro pensó que podía gastarse la vida defendiéndose de recriminaciones razonables o absurdas, mi convicción es que sólo la vanidad es capaz de desviarnos hasta tales extremos. Digo que los enemigos de la poesía no están entre quienes la profesan o resguardan, sino en la falta de concordancia del poeta. De ahí que ningún poeta tenga más enemigo esencial que su propia incapacidad para entenderse con los más ignorados y explotados de sus contemporáneos: y esto rige para todas las épocas y para todas las tierras.

El poeta no es un « pequeño dios ». 

No, no es un « pequeño dios ». No está signado por un destino cabalístico superior al de quienes ejercen otros menesteres y oficios. A menudo expresé que el mejor poeta es el hombre que nos entrega el pan de cada día: el panadero más próximo, que no se cree dios. El cumple su majestuosa y humilde faena de amasar, meter al horno, dorar y entregar el pan de cada día, como una obligación comunitaria. Y si el poeta llega a alcanzar esa sencilla conciencia, podrá también la sencilla conciencia convertirse en parte de una colosal artesanía, de una construcción simple o complicada, que es la construcción de la sociedad, la transformación de las condiciones que rodean al hombre, la entrega de su mercadería: pan, verdad, vino, sueños. Si el poeta se incorpora a esa nunca gastada lucha por consignar cada uno en manos de los otros su ración de compromiso, su dedicación y su ternura al trabajo común de cada día y de todos los hombres, el poeta tomará parte, los poetas tomaremos parte en el sudor, en el pan, en el vino, en el sueño de la humanidad entera. Sólo por ese camino inalienable de ser hombres comunes llegaremos a restituirle a la poesía el anchuroso espacio que le van recortando en cada época, que le vamos recortando en cada época nosotros mismos.

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DISCOURS DE STOCKHOLM.  IMPRIMERIE 
ALBERT TALLONE, 52 PAGES 1972
Los errores que me llevaron a una relativa verdad, y las verdades que repetidas veces me recondujeron al error, unos y otras no me permitieron - ni yo lo pretendí nunca - orientar, dirigir, enseñar lo que se llama el proceso creador, los vericuetos de la literatura. Pero sí me di cuenta de una cosa: de que nosotros mismos vamos creando los fantasmas de nuestra propia mitificación. De la argamasa de lo que hacemos, o queremos hacer, surgen más tarde los impedimentos de nuestro propio y futuro desarrollo. Nos vemos indefectiblemente conducidos a la realidad y al realismo, es decir, a tomar una conciencia directa de lo que nos rodea y de los caminos de la transformación, y luego comprendemos, cuando parece tarde, que hemos construido una limitación tan exagerada que matamos lo vivo en vez de conducir la vida a desenvolverse y florecer. Nos imponemos un realismo que posteriormente nos resulta más pesado que el ladrillo de las construcciones, sin que por ello hayamos erigido el edificio que contemplábamos como parte integral de nuestro deber. Y en sentido contrario, si alcanzamos a crear el fetiche de lo incomprensible (o de lo comprensible para unos pocos), el fetiche de lo selecto y de lo secreto, si suprimimos la realidad y sus degeneraciones realistas, nos veremos de pronto rodeados de un terreno imposible, de un tembladeral de hojas, de barro, de nubes, en que se hunden nuestros pies y nos ahoga una incomunicación opresiva.

En cuanto a nosotros en particular, escritores de la vasta extensión americana, escuchamos sin tregua el llamado de llenar ese espacio enorme con seres de carne y hueso. Somos conscientes de nuestra obligación de pobladores y - al mismo tiempo que nos resulta esencial el deber de una comunicación crítica en un mundo deshabitado y, no por deshabitado menos lleno de injusticias, castigos y dolores - sentimos también el compromiso de recobrar los antiguos sueños que duermen en las estatuas de piedra, en los antiguos monumentos destruidos, en los anchos silencios de pampas planetarias, de selvas espesas, de ríos que cantan como truenos. Necesitamos colmar de palabras los confines de un continente mudo y nos embriaga esta tarea de fabular y de nombrar. Tal vez ésa sea la razón determinante de mi humilde caso individual: y en esa circumstancia mis excesos, o mi abundancia, o mi retórica, no vendrían a ser sino actos los más simples del menester americano de cada día. Cada uno de mis versos quiso instalarse como un objeto palpable: cada uno de mis poemas pretendió ser un instrumento útil de trabajo: cada uno de mis cantos aspiró a servir en el espacio como signo de reunión donde se cruzaron los caminos, o corno fragmento de piedra o de madera en que alguien, otros, los que vendrán, pudieran depositar los nuevos signos.

Extendiendo estos deberes del poeta, en la verdad o en el error, hasta sus últimas consecuencias, decidí que mi actitud dentro de la sociedad y ante la vida debía ser también humildemente partidaria. Lo decidí viendo gloriosos fracasos, solitarias victorias, derrotas deslumbrantes. Comprendí, metido en el escenario de las luchas de América, que mi misión humana no era otra sino agregarme a la extensa fuerza del pueblo organizado, agregarme con sangre y alma, con pasión y esperanza, porque sólo de esa henchida torrentera pueden nacer los cambios necesarios a los escritores y a los pueblos. Y aunque mi posición levantara y levante objeciones amargas o amables, lo cierto es que no hallo otro camino para el escritor de nuestros anchos y crueles países, si queremos que florezca la oscuridad, si pretendemos que los millones de hombres que aún no han aprendido a leernos ni a leer, que todavía no saben escribir ni escribirnos, se establezcan en el terreno de la dignidad sin la cual no es posible ser hombres integrales.

Heredamos la vida lacerada de los pueblos que arrastran un castigo de siglos, pueblos los más edénicos, los más puros, los que construyeron con piedras y metales torres milagrosas, alhajas de fulgor deslumbrante: pueblos que de pronto fueron arrasados y enmudecidos por las épocas terribles del colonialismo que aún existe.

Nuestras estrellas primordiales son la lucha y la esperanza. Pero no hay lucha ni esperanzas solitarias. En todo hombre se juntan las épocas remotas, la inercia, los errores, las pasiones, las urgencias de nuestro tiempo, la velocidad de la historia. Pero, qué sería de mí si yo, por ejemplo, hubiera contribuido en cualquier forma al pasado feudal del gran continente americano? Cómo podría yo levantar la frente, iluminada por el honor que Suecia me ha otorgado, si no me sintiera orgulloso de haber tomado una mínima parte en la transformación actual de mi país? Hay que mirar al mapa de América, enfrentarse a la grandiosa diversidad, a la generosidad cósmica del espacio que nos rodea, para entender que muchos escritores se nieguen a compartir el pasado de oprobio y de saqueo que oscuros dioses destinaron a los pueblos americanos.

Yo escogí el difícil camino de una responsabilidad compartida y, antes que reiterar la adoración hacia el individuo como sol central del sistema, preferí entregar con humildad mi servicio a un considerable ejército que a trechos puede equivocarse, pero que camina sin descanso y avanza, cada día enfrentándose tanto a los anacrónicos recalcitrantes como a los infatuados impacientes. Porque creo que mis deberes de poeta no sólo me indicaban la fraternidad con la rosa y la simetría, con el exaltado amor y con la nostalgia infinita, sino también con las ásperas tareas humanas que incorporé a mi poesía.

Hace hoy cien años exactos, un pobre y espléndido poeta, el más atroz de los desesperados, escribió esta profecía: « À l'aurore, armés d'une ardente patience, nous entrerons aux splendides villes ». « Al amanecer, armados de una ardiente paciencia, entraremos a las espléndidas ciudades ».

PRESSE CHILIENNE OCT 1971 PRIX NOBEL

Yo creo en esa profecía de Rimbaud, el Vidente. Yo vengo de una oscura provincia, de un país separado de todos los otros por la tajante geografía. Fui el más abandonado de los poetas y mi poesía fue regional, dolorosa y lluviosa. Pero tuve siempre confianza en el hombre. No perdí jamás la esperanza. Por eso tal vez he llegado hasta aquí con mi poesía, y también con mi bandera.

En conclusión, debo decir a los hombres de buena voluntad, a los trabajadores, a los poetas que el entero porvenir fue expresado en esa frase de Rimbaud: sólo con una ardiente paciencia conquistaremos la espléndida ciudad que dará luz, justicia y dignidad a todos los hombres.

Así la poesía no habrá cantado en vano.